Wild is the wind
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 Whistle down the wind [April]

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AuteurMessage
Nemo Thackeray
Y'a pas un western sur la 9 ?
Nemo Thackeray


Messages : 315
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Whistle down the wind [April] Empty
MessageSujet: Whistle down the wind [April]   Whistle down the wind [April] EmptyMar 26 Avr - 15:59

Whistle down the wind [April] Neot

Je vais danser. Il fait nuit, et je vais danser. Rien de nouveau? Pas grand chose d'anodin non plus. J'ai mal. Pas le corps, mais le reste. Malgré ma tendance mutique à ne rien voir de vrai, et à dire tout le contraire (quand il m'arrive de dire), je suis d'ordinaire un optimiste fini. Là, non. J'ai mal, j'étouffe, et délivrez-nous du mal. Le désert est brulant; c'est peu commun. Il est habituellement frais la nuit, mais mes pieds sont nus, et le soleil qu'il a engorgé toute la journée parcoure tout mon corps sans que je puisse me l'expliquer. Je ne sais pas observer, non. Je ne peux pas rester là, debout, trop longtemps, sans rien faire. C'est beau, oui, bien sûr! Et mon esprit tordu rajoute des choses que, malheureusement, moi seul peut contempler. Mais je ne peux pas. Quelque chose frappe doucement en moi, comme un oiseau frappe doucement l'écorce, ou une branche aventurière cognant contre une fenêtre. Je n'écarterais pas les bras en croix, façon Jésus Christ, ne vous inquiétez pas. Il m'arrive d'être cliché, ou même je suis cliché tout le temps, je n'en sais rien, mais ça, non.
Je ne sais pas d'où vient le rythme. D'où vient que mon corps bat la pulsation d'un rythme lancinant qui, si je l'entendais dans un morceau, me secouerait jusqu'aux larmes? Je me connais, je peux maintenant avoir la prétention de dire que je me connais. Je sais ma gorge dans laquelle une boule va gonfler doucement et douloureusement si je danse maintenant, jusqu'à devenir des larmes, tout entier des larmes, des pieds jusqu'à la tête. Mes muscles qui se tordent me font du bien, mais me font d'abord passer par les larmes. D'où vient que "presque danser", comme j'ai l'habitude de le dire, peut faire pleurer, peut émouvoir, provoquer des sentiments, fatiguer l'âme dans le bon sens du terme? Après tout ce ne sont que des mouvements, des spasmes qui hors contexte pourraient paraitre ridicules. Ce sont des torsions. Le moment où le corps se transforme en tableau, et qu'un bras fendant l'air se transforme en tache de peinture blanche. Tout s'active, tout remue - qu'est-ce qui remue, qu'est-ce qui s'remue là dedans? Le danseur remue l'air, remue son corps, se remue lui? Et le spectateur, où est-il, que fait-il? Pourquoi n'ai-je pas besoin de spectateur, et comment, pour le danseur, danser peut se suffire à soi même? Des maux d'âme, des mots d'âme. Je divague, je dit ce qui me passe par la tête. Ça fait du bien puis ça m'étouffe.
Ce n'est pas moi qui bouge, c'est mon corps qui décide de le faire. Quelle force le meut? Qu'est-ce qui décide des mouvements de mon corps, puisque ce n'est pas moi? L'inconscient, cet alien qu'on a au huitième sous sol? Il parait qu'en ville, des gens se font payer pour écouter d'autres gens parler. Mais je n'ai pas envie de parler avec les mots. Pour filer la ridicule allitération, je veux parler avec mes maux. Voilà, c'est dit.

Les rythmes tribaux d'une musique qui ne serait formée que de percussions me peuplent, si une telle expression est possible pour un humain. Je suis une sorte de chaine stéréo articulée. J'ai les mêmes vibrations à chaque notre de basse. Parler, c'est raconter ce qui se passe à l'intérieur de vous - ce qui se passe, c'est des pensées transformées en rythmes, un peu comme l'ordinateur transforme les musiques en codes, ou je ne sais pas comment ça s'appelle vraiment. Mon dieu, mais qu'est-ce que je raconte...

Ne me demandez pas de décrire une quelconque chorégraphie. Je ne cherche pas à faire du beau, j'exorcise. Je me fais du bien, littéralement. Une catharsis qui m'abime, me met en colère puis, à la fin de la danse, quand vient l'épuisement, quand je m'étale sur le sol, troublant le silence de ma respiration saccadée, me rend homme neuf. Pas différent, neuf. Je recommence tout comme une première fois. Je ne vois jamais les choses exactement pareil. C'est fatiguant, très, je -
Pense trop et parle pas assez. Les spectacles que je fais ne sont jamais exactement ce que je fais quand je vais seul et pieds nus dans le désert. S'ils pouvaient me voir...Ils sauraient. Sous les yeux de quelqu'un, moi faisant cette danse, alors, ils sauraient, je serait en train de parler à quelqu'un d'une autre manière, au langage ce que fais l'intraveineuse à la nourriture. Mais en plus beau. J'espère. Mais qu'est-ce que je veux, à la fin? Qu'est-ce que je veux, pourquoi est-ce que mes intentions sont contradictoires? Je me suis menti à moi-même tout à l'heure. Non, en fait, j'ai été prétentieux, plutôt. Je ne me connais pas. Et je dis ça avec un grand sourire intérieur, parce que, vraiment, il faut arrêter de prendre tout trop gravement - la vie n'est pas une tragédie.

Voilà, j'ai parlé, parlé, et il me semble, si je repasse sur ce que j'ai pu dire, il me semble que j'ai été d'une prétention à tout épreuve.
Ne voyez vous pas à quel point c'est à la fois magique et génial ce que je viens de dire? Je viens de porter un jugement sur moi même. Un pas de plus vers la réalité, en quelque chose, puisque le jugement peuple nos contrées les plus lointaines et les plus proches, et même celles du milieu d'après les dernières nouvelles. J'aspire à la réalité - un peu.

Mais je suis un indécrottable, et puis, chassez le naturel, il revient au galop. Et alors? Et alors.
Tout se tait et je danse dans la chaleur étrange du désert éteint.
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Whistle down the wind [April]
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